Des compétences très variées
Le jardin des étoiles fait appel à des compétences très variées. Pour s’en convaincre, il suffit d’ouvrir la porte de la cabane. Jacques, nouveau retraité dynamique, s’est gentiment plié aux desiderata des jardinières, et il a soigneusement confectionné une série d’étagères, crochets et autres râteliers pour offrir un rangement optimal. La deuxième étagère, à hauteur de tête, est même arrondie pour qu’elle ne blesse pas quelqu’un qui s’y heurterait. Plus de prétexte pour ne pas trouver un outil ! Chacun est à sa place, suspendu, accroché, posé bien en ordre et classé par catégorie. Dès la mise en route des activités de jardinage, il avait déjà trouvé un système astucieux pour éviter que, d’une part, la porte sorte de ses gonds en s’ouvrant brutalement, poussée par une rafale de vent, et d’autre part, qu’elle ne se referme de façon impromptue, plongeant la jardinière industrieuse dans l’obscurité du réduit.
Ce 19 septembre, l’atelier Libre Cueillette est mis à profit pour débarrasser le jardin des plantes qui ont fructifié et ne passeront pas l’hiver puisqu’elles sont annuelles, comme le maïs par exemple qui a merveilleusement poussé et donné de longs et beaux épis aux grains savoureux, même crus (mais oui !). Pendant qu’Anne-Marie et Anny-France les arrachent, Sonia a démonté un panneau d’un des deux bacs à compost et étalé son contenu sur l’espace où fleurissait la jachère de l’été. Les vers, mécontents d’être dérangés et exposés à la lumière, se hâtent de plonger dans les profondeurs du terreau. Les grandes tiges feuillues sont jetées dessus pour protéger cette myriade de décomposeurs qui transforment en un rien de temps les déchets verts apportés par les résidents. Rien ne se perd ! Les plates-bandes vont s’enrichir de cet apport, elles ne risquent pas de voir leur terre s’épuiser.
A ce propos, Cédric, l’ancien animateur de Libre Cueillette devenu maraîcher bio, m’informe que Dominique Massenot, conseiller agricole indépendant, a une vision plus nuancée du rôle du compost. Sur le document de son site Amisol, L’agrobiologiste, la matière organique et l’humus, voici ce qu’il explique. « Selon les conditions pédo-climatiques (interaction entre le sol et le climat), les matières organiques se transforment différemment : elles peuvent être minéralisées, transformées en humus ou simplement accumulées. La minéralisation est la décomposition des molécules organiques sous des formes simples et solubles, qui servent de nutriments pour les microorganismes et les plantes mais peuvent également subir des phénomènes de lessivage (la pluie les emporte). »
« L’humification est ici définie comme une réorganisation de la matière organique par l’activité microbienne sous des formes insolubles pouvant être à nouveau minéralisées. L’accumulation concerne les matières organiques qui échappent à l’activité biologique, c’est-à-dire qui ne sont ni minéralisées, ni transformées en humus ; elles alimentent un cycle géologique (tourbe, charbon, …) mais ne participent pas à la fertilité du sol. » Il signale que l’apport de carbone, trop stabilisé par le processus de compostage, non seulement n’augmente pas l’intensité de l’activité microbienne, mais peut créer une carence en azote pouvant se répercuter au niveau de la plante. Les gros apports d’engrais organique, de compost, ou même de mulch, modifient autant, sinon plus, le « terroir » que les apports minéraux injustifiés. » Voilà un avis qui va à contre-courant de ce qui est habituellement diffusé dans le monde des écologistes !!!
Alors, que faire ? Un autre site traite le sujet de la faim d’azote. « Les champignons du sol qui dégradent le bois ont besoin d’azote pour décomposer la lignine lors d’un apport de BRF (bois raméal fragmenté, copeaux de bois). De même pour les bactéries du sol qui ont besoin d’azote pour digérer la matière organique non décomposée qu’on leur apporte en grande quantité, et elles puisent cet azote dans le sol. Du coup, il n’y en a plus assez pour les plantes. Voilà pourquoi il vaut mieux pailler à l’automne plutôt qu’au début du printemps: les champignons et bactéries ont le temps d’attaquer lignine et cellulose pendant l’hiver, et la décomposition est bien entamée lorsque les plantes sont installées au printemps. De plus un paillage carboné à l’automne (feuilles mortes, paille, BRF) permet de fixer l’azote qui se minéralise avant l’arrivée du froid et serait lessivé. Il favorise la vie du sol, il déclenche un processus de création d’humus et de développement de la pédofaune, qui évite la dégradation des sols laissés à nu, et il est indispensable à l’établissement d’un bon équilibre. »
« Toutes les plantes n’ont pas les mêmes besoins. Les fungi (champignons) vont transformer l’azote d’un sol à dominance lignine (BRF) en ammonium qui va être bénéfique aux arbres, arbustes et vivaces. Par contre, les plantes de cycles courts, tels que les légumes, annuelles et graminées, vont préférer un sol avec dominance bactéries, soit un azote sous forme de nitrates. «
Des cagettes dont Sonia a dégrafé les lattes du fond servent à bien repérer les groupes de plantes, oignons, aromatiques, qui, parfois, dans un désir débordant de vouloir bien faire, peuvent être confondus avec les « sauvages » et arrachés pendant la séance de désherbage… A ce propos, l’une de ces invitées surprise nous intrigue. Personne ne l’a jamais rencontrée au cours d’une promenade à la campagne. Qui peut-elle bien être ? Comme d’habitude, nous faisons le tour du jardin en examinant soigneusement chaque plante. Il reste encore un piment de padron, un peu tordu, mais déjà suffisamment gros pour être bientôt cueilli. Il en est de même de la chayotte qui fructifie et fleurit en même temps. Si l’on tarde à prendre les fruits, ils vont commencer à germer sur pied ! Un piquet récalcitrant nécessite l’emploi de la grelinette pour le déchausser. Non mais !